Endurance Trail 2013 : Mon premier Ultra !

Tout commence jeudi matin à 8h quand le réveil sonne. Je ne le sais pas encore mais je ne retrouverai le sommeil qu’après avoir franchi la ligne d’arrivée de l’Endurance Trail vendredi soir.

La journée passe, la pression monte encore d’un cran et je trépigne d’impatience à l’idée de pouvoir enfin prendre le départ. Je m’occupe comme je peux, en essayant de ne pas trop y penser.

Je fais quelques tentatives de siestes toutes avortées pendant la journée ainsi qu’en début de soirée.

Minuit, dernières vérifications du sac et des ravitaillements, j’enfile ma tenue et nous prenons la route pour Millau.

Nous arrivons sur place à 2h45. Je file retirer mon dossard et retourne à la voiture. Il y a un vent terrible sur la zone de départ. Ma dernière tentative d’arracher quelques minutes de sommeil se soldera une nouvelle fois par un échec.

Il est temps de rejoindre la ligne de départ. Je suis envahi par l’émotion. J’attends cette course depuis si longtemps, je l’ai couru déjà tellement de fois dans ma tête.

4 heures du matin :

L’hymne des Templiers, le célèbre Ameno d’Era fait toujours son petit effet. Le départ est donné à la lumière rouge des fumigènes, transperçant la nuit étoilée.OLYMPUS DIGITAL CAMERACa part assez vite, je suis surpris sachant ce qui nous attend par la suite. Sur les premiers kilomètres je ne cesse de me faire doubler, peu importe, le chemin est long et il me semble suicidaire de suivre un rythme trop élevé.

Les sensations ne sont pas très bonnes mais la première difficulté du parcours est avalée à bon rythme. J’ai de grosses douleurs intestinales. J’ai l’impression de recevoir un coup de couteau à chaque foulée. Pourtant je suis loin d’être en surrégime comme le confirme le cardio.

J’ai du mal à m’hydrater et à m’alimenter mais je me force car je connais les conséquences de la déshydratation et de l’hypoglycémie. Je dois manger et boire régulièrement si je veux croire en mes chances d’aller au bout de cette course.

Le premier ravitaillement à Rivière-sur-Tarn arrive après 19 km et 900 D+, il fait encore nuit, je ne m’y arrête que très peu de temps. J’y retrouve Anne qui me suivra toute la journée sur différents points du parcours.

Je viens de boucler 1/5ème de la course. Afin de ne pas trop m’effrayer, j’ai « saucissonné » le parcours en plusieurs étapes que j’enchaine les unes après les autres. Mentalement, je quitte un ravito pour un autre, sans trop penser à tout le chemin qu’il me reste à parcourir jusqu’à l’arrivée. Ca vaut ce que ça vaut, mais ça semble faire ses preuves.

Prochaine étape Mostuéjouls au kilomètre 42.

Cette portion de 23 km va se jouer en 2 parties. La première où je ne prends aucun plaisir tellement mon ventre me fait souffrir, je subis totalement la course. Je suis contraint de m’arrêter plusieurs fois … je ne pense qu’à abandonner. Ca va durer pendant 22.8 km …

Les 200 derniers mètres avant le ravitaillement vont m’être salutaires, je reprends gout à la course, mon ventre va mieux, et le fait d’être attendu me galvanise. Sur une course comme ça, suiveur et coureur forment une équipe, et même si je suis seul à courir, je sais qu’on compte sur moi, ça me motive à avancer.

C’est décidé, je continue !

Je ne suis pas venu là pour abandonner maintenant.

J’ai de l’avance sur la barrière horaire que je redoutais tant, j’en profite pour me restaurer. Il est environ 10 heures, je cours depuis un peu plus de 6 heures maintenant.

Le prochain point de rendez-vous est fixé au Rozier au kilomètre 50. Les sensations reviennent, l’étape est assez courte et j’en profite pour accélérer un peu le rythme. C’est curieux mais au moment ou certains commencent à faiblir, je retrouve des sensations. Après plus de 50 kilomètres, il était temps.

A partir de là, j’entre dans l’inconnu, je n’ai jamais couru aussi longtemps ni sur une telle distance. Comment mon corps va-t-il réagir ? Je n’en ai aucune idée. Le manque de sommeil aidant, je ne suis pas à l’abri d’un gros coup de fatigue.

Entre le Rozier et Saint-André-de-Vézines au kilomètre 63, tous les voyants sont au vert. Les ascensions se font en marchant mais à bonne allure et je cours encore sur le plat et dans les descentes. A ce moment de la course, nombre de mes compagnons d’infortune en sont réduits à marcher avec plus ou moins de style !

Après 10h40 de course, j’ai parcouru 63 kilomètres et 3200 D+. La barrière horaire n’est pas une menace pour le moment car j’ai 1h45 d’avance.OLYMPUS DIGITAL CAMERA

Anne insiste pour que je me change, je reste une quinzaine de minutes au ravitaillement avant de reprendre la route vers la Roque-Sainte-Marguerite. Il y a 11 bornes à parcourir. Certainement les plus beaux kilomètres du parcours, les paysages sont somptueux, quelle chance de pouvoir évoluer sur un parcours aussi grandiose. La descente vers la Roque est assez longue et usante. Après 74 km, je commence à ressentir une grande fatigue m’envahir. Je prends mon temps au ravitaillement, je suis venu pour  découvrir, apprendre et finir, le chrono n’a pas vraiment d’importance. Je mange, je m’hydrate aussi beaucoup car la prochaine étape qui me mènera jusqu’à la ferme du Cade va être longue.

En repartant de la Roque, je croise un coureur en contre-sens. Je lui fais remarquer son problème d’orientation. Il m’annonce vouloir abandonner, il est envahi par la lassitude et la fatigue. Je vais finalement le convaincre de me suivre en lui promettant de l’amener jusqu’au bout. Bien présomptueux venant d’un type sans aucune expérience sur la distance. En même temps, maintenant je ne peux plus reculer, je dois aller au bout, pour moi, mais aussi pour lui.

Nous allons mettre 5 heures à parcourir les 18 kilomètres de ce tronçon. La nuit, le manque de sommeil et la fatigue musculaire vont nous forcer à ralentir. La longue descente du Larzac jusqu’au pont de Massebiau pourtant très roulante s’apparente à un véritable chemin de croix. Nous ferons même une pause de quelques minutes dans les herbes hautes d’un chemin surplombant les gorges de la Dourbie.

La cote de Massebiau qui nous amène à la ferme du Cade se dresse en véritable juge de paix. Eparpillés sur le bord du chemin, le regard hagard, quelques coureurs sont en attente d’un second souffle qui ne viendra peut-être pas.

Le dernier ravitaillement est en vue, à moins d’un accident ou d’une grosse défaillance, je sais que nous irons au bout de cette aventure un peu folle. On ne traine pas, il reste moins de 8 kilomètres pour rejoindre Millau et la ligne d’arrivée. Nous retrouvons la force de courir sur les portions roulantes. Pas question de se blesser maintenant, nous prenons nos précautions dans la descente finale. Un passage par la grotte du Hibou, autre grand symbole des Templiers, et la voix du speaker se fait entendre. Je regrette presque que la course soit déjà finie.

100 km et 4800 D+

Je franchis la ligne d’arrivée avec Anthony, mission accomplie, le voilà finisher, lui qui pensait jeter l’éponge à 30 kilomètres de l’arrivée. Je crois que je suis au moins aussi heureux pour lui que pour moi. Malgré un manque de préparation évident, je finis cette course dans de bonnes conditions, ce qui est plutôt positif pour la suite.

Sans oublier la souffrance des premières heures, je garderai un excellent souvenir de cette incursion dans le monde de l’ultra trail. Etre accompagné tout au long de la journée sur les différents ravitaillements, être soutenu par ses proches, recevoir des messages d’encouragements, sont autant d’aides précieuses sur le plan moral et psychologique. Sans vous (vous vous reconnaitrez), l’aventure n’aurait pas eu la même saveur et le dénouement en serait certainement chamboulé. L’ultra comme je le vois, est un sport d’équipe où chacun trouve sa place, ou même les gestes les plus insignifiants peuvent avoir de l’importance.

 

Sébastien Réby

 

2 réponses

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