Suspicion de dopage : faut-il jeter les coureurs aux lions ?

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Nouveau tremblement sur la paisible planète trail ces derniers jours : un coureur français a été contrôlé positif aux corticoïdes lors de la dernière édition des Templiers. Au-delà de ce qu’il a pu commettre ou non, si on s’arrêtait quelques instants sur la façon dont il a été jeté en pâture ?

Ne vous méprenez pas : il ne s’agit en aucun cas dans cet article de dédouaner un quelconque acte de tricherie ou de minimiser un cas de dopage. Nous prônons sur Globe Runners une pratique honnête et surtout saine de notre sport et c’est le cas de l’immense majorité d’entre vous également.

Arrêtons-nous toutefois sur ce dernier cas signalé par le site SPE15 tout récemment. Un traileur contrôlé positif aux corticoïdes sur la Grande Course des Templiers se voit ouvertement nommé et dans la foulée lynché sur les réseaux sociaux, y compris par d’autres athlètes, comme s’il était le dernier des tricheurs.

L’un de ces athlètes encourage -entre autres réactions hautement philosophiques- à le « traîner dans la boue », le post a étrangement disparu depuis, mais il a beaucoup fait réagir. Pendant ce temps, le coureur contrôlé positif a demandé l’examen de l’échantillon B, et il attend des nouvelles de la FFA. Il a envoyé son dossier médical pour clamer sa bonne foi, pendant qu’on se déchaîne sur son dos.

En quoi est-ce choquant ? Si vous vous posez la question, c’est que le problème est encore plus grand que nous le pensions.

Quid de la présomption d’innocence ?

On peut rejeter le dopage de tout son cœur et son corps, et cela semble même plutôt sain. Mais on doit avant tout respecter son prochain, et il n’est pas question ici d’un quelconque livre religieux mais bien de savoir vivre.

Ce coureur, dont nous tairons le nom même si le mal est déjà fait, est cité partout sur les réseaux sociaux et sur internet. Il sera peut-être condamné, sans doute même au vu des éléments. Mais, et si ce n’était pas le cas ? Admettons qu’il soit finalement innocent, en tout cas qu’il prouve sa non-culpabilité ? Eh bien la sanction sera quand-même tombée.

Pour son image, pour sa réputation, pour sa famille et ses amis aussi. Son nom sera associé au dopage aux yeux du grand public avec tout ce que cela induit. Rappelons à ceux qui auraient quelques absences que son nom est bien souvent le même que celui de ses enfants, de sa femme, de ses parents, et qu’ils seront tous éclaboussés.

Il y a d’ailleurs un précédent avec un autre coureur cité dans une affaire de dopage il y a quelques mois (pour plusieurs no-show, ces contrôles inopinés à domicile manqués). Son nom a été dévoilé par un site – là encore par Spe15- il a été considéré par tous comme un dopé pendant des semaines, et une fois qu’il a été blanchi, le mal était déjà fait.

Jouer au chevalier blanc sans imaginer les conséquences, vraiment ?

Certains diront : « mais si on ne cite pas leur nom, ils s’en sortent tranquillement, alors c’est bien fait pour eux ». On peut d’abord leur répondre que jusqu’à preuve du contraire, on ne fait pas justice soi-même, c’est l’une des bases de notre société.

On peut ensuite leur répondre qu’ils auront tout le temps de les citer si ces athlètes sont un jour condamnés. En attendant, la course au clic ou au lynchage ne doit pas primer.

Il est certain que le dopage gangrène l’athlétisme comme beaucoup de sports depuis des années, et il est illusoire de penser que le trail passera à côté. Vouloir lutter contre ce fléau est tout à fait noble. Mais pas de cette façon. Contribuer au lynchage d’un athlète qui est peut-être innocent, est-ce réellement plus louable que de tricher soi-même ? Certains diront que oui.

Contentons-nous plutôt d’attendre que la FFA fasse son travail. Si ce coureur a triché, qu’il paye. En attendant, à ceux qui le lynchent sans aucune once de réflexion ou de respect : allez courir un peu, cela vous fera du bien.