Globe Runners

Saintélyon 2013 : Bouquet final

Grég SaintélyonCette année je me suis invité au 60ème anniversaire de la Saintélyon. Découverte en 2010, accompagnateur en 2012, je souhaite, pour ma dernière participation solo, me rapprocher des 8h (temps de référence établi en 2010 avec 7 km et 300m D+ en moins).

J’ai eu la chance que Jean-Claude Vollmer, entraîneur et responsable du haut-niveau à l’INSEP, me prépare, pour l’occasion, un plan d’entraînement sur mesure. Mon abandon au Trail des Aiguilles Rouges (en septembre), pas encore totalement digéré, pollue toujours un coin de mon esprit.

Cette Saintélyon sonne donc comme une petite revanche !

Tout commence le vendredi, à Lyon, par le retrait des dossards. Une bonne nuit de sommeil plus tard et une tension inhabituelle me suit, telle une ombre, toute la journée du samedi. La  forme est pourtant là mais le doute me ronge. La faute à quoi ? Je l’ignore encore aujourd’hui !

Je suis très entouré pour cette édition 2013. Ma chérie, et ses deux comparses Christelle & Audrey, sur la SaintExpress en mode rando (45 km – 1100m D+). Cindy qui les avait accompagnées 3 ans plus tôt, privilégiera le mode rando-course sur cette même épreuve. Gaëtan, pour une première en relai.  L’infatigable Régis, le surentraîné Martial et le marathonien Phil sur la solo. Enfin, l’ensemble du groupe de l’Union Athlétique des Couleurs de Morestel, présent sur les différentes formules, que j’ai toujours plaisir à retrouver.

Le paradoxe est que, plus minuit approche, plus je me détends. L’envie d’en découdre semble la plus importante si bien que, en pénétrant dans le SAS de départ avec Gaëtan, je me sens vraiment calme et serein. J’ai mon plan de course bien en tête et je profite au maximum de l’incroyable ambiance de départ.

Il est 23h58, les frontales font la ola avant un ultime rappel des consignes de sécurité et de solidarité puis, la meute est lâchée. Il me faudra 4 longues minutes pour passer la ligne et, enfin, me sentir libre et heureux !!! Je pars sur un rythme aisé, histoire de chauffer la machine, en augmentant progressivement la cadence. Les rues de St-Etienne s’emplissent d’un long cordon de coureurs au front lumineux. Les premières difficultés font leur apparition et je me sens plutôt bien, ma foulée est bonne, mon souffle calme et mon cœur assez bas. Pour d’autres cela semble plus difficile ! Entre parenthèse, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur la présence ici de coureurs marchant dès Sorbiers : quel est l’intérêt de se mettre dans un sas inadapté à son objectif et à ses capacités?

Lorsque le chemin remplace enfin l’enrobé, les plaques de verglas commencent à jouer à cachecache avec les coureurs. Parfois flagrantes, souvent dissimulées, elles seront source de nombreuses chutes autour de moi – dont deux à mon actif mais sans gravité.

Saint Christo-en-Jarez (km 15,5)

Je ne m’arrête pas vraiment. Un petit bonjour aux courageux bénévoles et j’emporte quelques bricoles pour me ravitailler dans le raidillon qui suit. Même s’il faut que je veille à m’hydrater plus régulièrement, je suis bien dans ma course et plutôt frais.

Le peloton est encore dense et, malgré une place dans la première partie de la course, je ne parviens pas à conserver un rythme constant. Le parcours cassant et enneigé rend la progression difficile. Dans ces conditions, doubler nécessite beaucoup d’efforts.

Dans les descentes, jalonnées de pièges, des concurrents sont au ralenti, tétanisés par l’instabilité du sol, ou arrêtés pour s’équiper de chaînettes à neige. Les voir ainsi, perdant un temps incroyable à les mettre ou à les enlever, m’ôte tout regret de ne pas avoir retenu cette option.

Sainte-Catherine (km 30)

Je suis moins frais que je l’espérais après un peu moins de 3 heures de course. Je ne m’attarde pas en ce lieu emblématique de la Sainté  préférant me restaurer à la sortie du ravitaillement, le long des bus chauffés, un appel du pied aux coureurs gelés, fatigués, las ou blessés.

J’entame l’ascension suivante prudemment, en marchant mais je me sens un peu moins à l’aise qu’un peu plus tôt dans la course. Sur le plateau qui suit, au petit trot, les sensations ne sont pas meilleures. Malgré cela, je double toujours plus que l’on ne me double, y compris dans les lacets du Bois d’Arfeuille, pris dans le sens de ma montée cette année. Au sommet, sur un faux-plat bitumé, je tente, en vain, de rentrer sur le petit peloton qui me précède. C’est dur et, alors que je lutte pour maintenir ma vitesse autour de 10km/h, mon esprit a tendance à s’égarer. Autre facteur non négligeable : le ravitaillement solide ne passe plus ! Le moral est en berne, la pause à Saint-Genoux  paraît inéluctable.

St-Genoux (Km 42)

Un coup d’œil au PC de contrôle me permet de constater que je suis alors en 227ème position. Malgré les difficultés de la dernière heure, je reste dans une bonne dynamique de progression et ma moyenne n’a pas tant baissé que cela (9 km/h). Le moral remonte quand je quitte les chaleureux bénévoles à qui je souhaite bon courage pour la longue nuit qu’il leur reste à passer là.

Les kilomètres qui suivent sont cassants mais les sensations reviennent petit à petit. Je lutte maintenant pour ne pas m’emballer et je ressens, à cet instant, une incroyable facilité. Je ne sais si cela va durer mais je suis simplement aérien. Je double des solos, des relais… Plus de peloton, évidemment, mais des coureurs loin d’être à la dérive. Je prolonge la durée de course bien plus loin que les autres et ma cadence de marche semble plus efficace que celle des coureurs qui m’entourent.

Soucieu-en-Jarrest (km 54)

J’ai pris le temps de me ravitailler (enfin, ce qui voulait bien passer), il ne reste plus qu’un semi, globalement descendant, mais au profil, finalement, assez exigeant. Les kilomètres commencent à défiler moins vite, le pas se fait plus lourd et les muscles répondent de moins en moins aux sollicitations. Les cuisses, les mollets et les genoux me font souffrir et aucune bosse n’est assez raide pour se décontracter en marchant. Les coureurs sont maintenant bien éparpillés ! Mis à part des relais qui me passent avec une facilité déconcertante, peu nombreux sont les dossards noirs que je croise.

Depuis le panneau indiquant l’arrivée à 15 km, je sais que je peux retrouver ma chérie à tout instant. C’est dans Chaponost, au détour d’une rue éclairée, que je distingue trois silhouettes familières. Quelques instants plus tard, je les serre très chaleureusement dans mes bras. Quel bonheur de les voir ! Mes mollets commençaient à sérieusement tirer et je profite de leur compagnie pour marcher quelques minutes à leur côté. Ma chérie et Chris sont au top mais cela va un peu moins bien pour Audrey dont j’aperçois les quelques larmes qui roulent sur ses joues. Elle est bien entourée, je garde confiance ! Je les quitte, à une douzaine de kilomètres de l’arrivée, le moral au top et les jambes un peu moins douloureuses. Merci les filles !!!

La descente précédant l’ultime ravitaillement me confirme, s’il le fallait, la montée exponentielle de la fatigue et des douleurs. Mes cuisses se tétanisent et je n’ai plus la souplesse nécessaire pour allonger la foulée et suivre le coureur solo qui me passe.

Beaunant (km 68)

Je marque la pause et repars, en marchant, dans l’ascension des aqueducs et son passage à 18%. Il ne reste alors 7 km et j’ai une cinquantaine de minutes pour passer sous les 8h. Ça devrait le faire !!! Je reprends le trot quand la pente se fait moins raide. La fin du parcours a changé et les quelques petits coups de cul me semblent interminables. Quelques coureurs me doublent mais je ne cherche même pas à les accrocher. Je suis déjà content de pouvoir encore courir malgré que l’ensemble des muscles des jambes me tiraillent en tous sens. Quelques détours dans les rues et jardins de la Mulatière puis, la Saône et le Rhône apparaissent sous nos yeux alors que le jour commence à se lever sur la capitale des Gaules.

Je rejoins les bords de Saône par une centaine de marches avant d’emprunter la passerelle qui nous mène à la presqu’île. La fin de course est plus courte et plus jolie que les autres années. Dans la dernière ligne droite, le peu de monde présent a bien du mal à se faire entendre. Quelques timides encouragements accompagnent néanmoins mon entrée dans un palais des sports éteint et silencieux. Je passe la ligne d’arrivée 7h54 et une poignée de secondes après avoir quitté Saint-Etienne. Je suis accueilli par Nathalie Mauclair en personne, ce qui vient conclure une course parfaite ou presque. Les doutes, aux alentours du kilomètre 40, n’ont que peu de place à côté du plaisir innommable pris lors de la majeure partie de ce magnifique parcours. Les sacrifices, le travail, les entraînements et la remise en question suite à l’abandon du TAR sont aujourd’hui récompensés par une incroyable et inespérée 169ème place (sur 6000 participants au départ).

Je retrouve alors Cindy, arrivée quelques minutes plus tôt, et les membres de l’UAC qui m’accueillent chaleureusement dans leur « loge ». Je m’y installe confortablement pour attendre ma chérie qui passera la ligne peu avant 10h avec Chris (l’entorse d’Audrey aura eu raison de son mental au km 35). 45 kilomètres de marche, 1100m de D+, de nuit avec une température avoisinant les -5°C pendant 11h !! Chapeau les filles pour votre courage, votre abnégation, votre mental et l’état d’esprit dont vous avez fait preuve et qui vaut, à lui seul, toutes les louanges d’un ultra-runner admiratif.

Philippe et Stéph, suivis quelques minutes plus tard Régis, terminent tous les 3 dans des chronos avoisinant les 10h. Phil et Martial, quant à eux, suivront une heure plus tard tandis que Pierre et Fares seront finishers de cette 60ème édition dans des temps proche du mien.

Une parenthèse importante sur Yoann mon partenaire de team, 13ème en 6h26, d’une épreuve de ce niveau. C’est tout bonnement exceptionnel !! Chapeau Champion. (Saintélyon par Yoann Stuck)

Depuis le TAR, une expression tournait en boucle dans ma tête : « Ce qui ne tue pas… rend plus fort » ! Je voulais lui donner un sens particulier, qu’elle illustre mon caractère… J’y suis parvenu, non sans mal, sur cette ultime épreuve de l’année 2013. Si je n’en porte pas encore les couleurs j’espère avoir dignement représenté le team Univers-Running qui m’a donné sa confiance pour la prochaine saison. Cette 60ème édition sera définitivement ma dernière Sainté-Lyon et je ne pouvais  rêver meilleur épilogue. J’y reviendrais tout de même, en relai ou en accompagnateur, car, il faut le dire, j’adore cette course !

Maintenant place au repos et à la détente ! La prochaine saison attaquera le 6 janvier… C’est déjà demain !

Greg
trail-et-montagne

Exit mobile version