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Scandale dans le monde de l’athlétisme

Syringe racetrack

Difficile de passer à côté ces jours-ci, mêmes les grands médias nationaux en ont fait leurs ouvertures de journaux. L’affaire de dopage qui touche le monde de l’athlétisme pourrait bien ébranler durablement la discipline.

Rappel des faits : au coeur de l’affaire, un rapport de 335 pages, celui de l’AMA, l’agence mondiale anti dopage. Dans ce pavé dévoilé lundi dernier, des accusations accablantes à l’encontre de la fédération d’athlétisme russe. L’AMA va jusqu’à évoquer un  »haut niveau de collusion » entre athlètes, coachs, officiels, et médecins pour permettre aux athlètes russes de se doper en toute impunité, dans le seul but de fournir des vainqueurs au pays.

L’agence anti dopage russe aurait notamment reçu des pots de vin pour fermer les yeux sur des tests positifs. C’est même un dopage d’Etat qui est évoqué, puisque ce système  »n’aurait pas pu voir le jour sans l’assentiment du gouvernement ». Les mots sont forts, et l’agence insiste encore : les JO de Londres ont été sabotés selon elle.

Il suffit de regarder les chiffres : la Russie fut le deuxième pays le plus récompensé en athlétisme avec 18 médailles dont 8 titres. Sur 47 épreuves au total. Autant dire que c’est l’ensemble de la compétition qui a été faussée. Bref, l’AMA demande du ménage, et l’exclusion des athlètes russes aux prochains JO qui auront lieu à Rio dans huit mois.

Quelles seront les sanctions ?

Difficile à dire pour le moment, car l’AMA n’a aucun pouvoir de décision. C’est à l’IAAF, la fédération internationale de trancher quant à la participation ou non des athlètes russes aux prochains jeux. En attendant, la Russie vient d’être suspendue provisoirement de toute compétition internationale. Mais ça ne s’arrêtera évidemment pas là.

Plusieurs athlètes et fédérations, qui estiment qu’elles ont été lésées, vont maintenant réclamer les médailles qui leur ont échappé au bénéfice des athlètes russes. Ce sera long, compliqué, et certainement pas beau à voir pour l’image de l’athlétisme auprès du grand public.

L’ex président de la fédération internationale Lamine Diack, 82 ans, est mis en examen par la justice française, tout comme ses deux fils, pour corruption passive et blanchiment aggravé. On l’accuse notamment d’avoir reçu en 2011 plus d’un million d’euros de pots de vins pour fermer les yeux sur des cas d’athlètes russes dopés. Diack vient de démissionner du comité international olympique. Mais le mal est fait, l’institution est elle aussi dans l’oeil du cyclone.

Dans la deuxième partie du rapport de l’AMA qui devrait être rendu public d’ici la fin de l’année, l’IAAF pourrait également être durement mise en cause … Affaire à suivre donc !

L’athlétisme russe est-il le seul concerné ?

Non. En août dernier la chaîne allemande ARD, par laquelle est arrivé le scandale, diffusait un documentaire édifiant sur le dopage organisé chez les athlètes russes… Et kenyans.  »La Russie n’est pas le seul pays à faire face au problème du dopage organisé » a assuré Dick Pound, le président de la commission à l’origine de ce rapport. Il menace :  »Le Kenya a un vrai problème. Si il ne travaille pas sérieusement, d’autres le feront pour eux. » Des propos qui rappellent la suspension de Ripta Jeptoo, l’une des stars de la discipline, suspendue 2 ans en janvier dernier pour un contrôle positif à l’EPO.

Regardez d’ailleurs les performances sur marathon cette année : aucun chrono stratosphérique sur les gros évènements, et seulement 3 athlètes sous les 2h05 depuis le début de l’année, contre 8 l’an dernier à la même époque.

Le Kenya et la Russie sont dans le viseur du monde de l’athlétisme. Mais ne seraient-ils pas les arbres qui cachent la forêt ? Certains agents de coureurs russes évoquent l’Ethiopie et ses contrôles compliqués. Et si certains athlètes avaient aussi pu individuellement passer entre les mailles du filet moyennant une coquette somme d’argent ? L’AMA ne s’interdit pas de le penser aujourd’hui. Et c’est tout le monde de l’athlétisme qui tremble.

Et maintenant ?

Soyons clairs : il y aura un avant et un après. Aucun scandale n’a touché si durement la discipline depuis les heures sombres de la guerre froide, avec déjà des affaires de dopage d’Etat (la Russie, la RDA) qui ont fait des ravages à l’époque. Au delà des conséquences sportives et judiciaires, c’est l’image de l’athlétisme auprès du grand public qui va en souffrir.

Comment s’extasier désormais devant une incroyable performance sans avoir un regard soupçonneux ? Comment suivre avec envie une compétition comme les JO quand on sait que les précédents jeux ont -semble-t-il- été une vraie mascarade ? Il faudra faire le dos rond, comme l’a déjà fait le monde de l’athlétisme, ou plus récemment le monde du vélo. Et reconstruire sur des ruines. Après avoir fait un bon ménage.

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